On pourrait s’en gausser ou mieux lui crier dessus.
Cette minorité de citoyens qui s’entête à rouler sur des vélos
en ville pour faire des courses, aller au travail (lorsqu’ils
ont en) ou pire, mener des enfants à l’école n’est-elle pas
tout simplement l’expression d’êtres inadaptés? incapables de
communiquer et de comprendre leur monde? des êtres égoïstes
incapables de s’identifier à l’autre et enfermés dans des
certitudes rétrogrades?
Des êtres du refus. Qui ne suscitent que moqueries, voire de la
compassion pour les plus vieux.
Oui, un vieux à vélo, après tout, on peut très bien l’admettre:
il est vieux! Il ne dérange pas. Enfin pas trop. Aux carrefours, il
a le temps d’attendre que la caravane passe.
Après tout, on devrait instituer un jour de vélo pour les
vieux.
Par exemple le mercredi…Comme pour faire les courses.
Afin qu’ils ne dérangent pas trop aux heures de pointes dans la
rue et aux caisses de Super U.
Et en plus, un vieux à vélo, ça fait couleur locale. Comme les
vieux à béret, il y a les vieux à vélo, susceptibles d’attirer les
touristes étrangers et de regonfler notre balance commerciale!
Pourquoi pas?
Le problème, c’est les jeunes. Ceux-là refusent l’évidence: la
supériorité et l’universalité de l’auto. Mobile.
Combien de temps allons-nous devoir les tolérer, sur ces vélos
grotesques et salissants?
Oui, ceux-là refusent l’évidence: on n’a rien inventé de mieux
pour s’extraire de l’environnement froid, bruyant, pollué,
malodorant et agressif de la rue que…la voiture. Hermétique,
départiculée, aseptisée, dépollenisée, insonorisée,
antiparasitée…la voiture!
Ces citoyens du refus qui rechignent à se déplacer au volant
d’un cabriolet confortable en écoutant RTL ne sont-ils pas tout
simplement introvertis? frustrés? incapables de s’adapter au monde
moderne qui leur tend la main?
Bref, ces jeunes là sont des fils de soixante-huitards qui
auraient mal tournés! Après leurs parents.
C’est qu’ils nous coûtent en dérangements ces cyclistes
handicapés: peintures et panonceaux spécialisés, emprise de
chaussées rétrécies…et du stress ajouté pour la gent motorisée
angoissée par ces « Don Quichotte » du guidon qui surgissent
inopinément devant les capots.
Mais la République généreuse va les encourager: permis simplifié
pour les plus jeunes, prime à la casse pour les moins convaincus et
pénétrantes urbaines élargies pour sortir la bagnole du marasme qui
guette.