– T’es d’où toi?
La question embrase les gazettes de l’été.
Avec un « t’es d’où toi? » on peut tenir jusqu’en septembre.
Même au-delà!
Pour un cycliste rencontré sur la route des Crêtes, le t’es d’où toi? peut appeler plusieurs réponses…
– Ben, je suis de Saint-Amarin, pourquoi?
– Moi je suis de Vendée
– IK kom uit Vlaanderen, waarom?
– Moi, je suis du Nord, pourquoi?
– Moi, j’suis d’là bas, m’sieur…
Jusqu’ici, tout va bien.
Les gens du nord sont pratiques, ils ne s’embarrassent pas.
Au moins, le nord, on sait où cela se trouve. Il suffit de prendre une boussole.
Mais il a encore mieux.
Prenons les gens du midi, c’est à dire ceux qui habitent le sud de la France; eux sont encore plus simplistes, ils ne reconnaissent que deux points cardinaux, le nord et le sud.
L’est? connais pas!
L’Allemagne, oui! mais l’est…
Pas de sarcasmes à l’égard des gens du sud! Si la France se résume dans le subconscient à deux régions, c’est parce qu’il y subsiste la fracture ancestrale de la langue d’oc avec la langue d’oïl. Braudel dit « Il y a eu, il y a encore, il y aura toujours, vers le sud, une « autre » France » (Identité de la France-Titre 1- Que la France se nomme diversité-Fernand Braudel)
Ainsi la France se partagerait selon une ligne médiane, aux limites variables, aux cicatrices multiples aussi bien vers le sud que vers le nord…
Pour les sudistes, le nord semble tellement écrasant de supériorité terrestre que parfois il commence tout de suite après Orange.
Reconnaissons-le, le Français est aussi nul en géo qu’en histoire.
Mais avec le regroupement des régions pompeusement appelé réforme territoriale, le Gouvernement pourrait sauver la mise.
Moins de régions simplifierait la difficulté à se reconnaître…selon nos hommes politiques du moment.
Une belle foutaise en réalité qui fait fi de réalités très complexes.
Braudel, notre grand géographe, a démontré que notre identité n’est pas seulement liée à notre lieu d’habitat, mais aussi à notre histoire, nos métiers, nos cultures, nos zones de chalandise et nos infrastructures.
Ainsi les Alsaciens deviendraient des habitants de l’Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne…autrement dit en raccourci des Al-lo-ch-ars!
Demandez à un Champardennais ce qu’il pense de sa région: rien!
Cette région est faite de bric et de broc, d’un assemblage de Pays sans histoire commune, ni légitimité territoriale.
Un seul département, la Marne, et sa richesse viticole suivi par l’Aube qui portent les deux autres départements que sont la Haute-Marne et les Ardennes en pleine faillite démographique.
Il habite nulle part car entre un Ardennais de Givet et un Haut-Marnais de Fayl-Billot, il n’existe aucun lien.
Pire! pour un Haut-Marnais de Chaumont, les Bragards de Saint-Dizier sont des gens du nord avec lesquels on ne se mélange pas.
Quant aux Bragards, ils se sentent plus proches des Barisiens de la Meuse.
De même qu’en Alsace, les Bas-Rhinois sont très mesurés à l’égard des Haut-Rhinois, même ils n’en pensent pas moins…et vice et versa.
Pour un Alsacien, la notion de région a une géométrie variable.
D’ailleurs le Unser Land alsacien revendique d’abord l’appartenance à une culture, une tradition, une langue très peu ouvert à l’autre, l’immigré de l’intérieur. Pas question de se marier avec n’importe qui!
Chacun défend donc son concept régional comme il l’entend.
Finalement savoir d’où l’on est, presque tout le monde s’en fout.
Il n’y a que le monde politique qui se passionne pour la question.
En cause, on le sait, qui va emporter le leadership de la future direction régionale? Strasbourg? Nancy? Metz?Reims?…et les postes qui vont avec.

Bien dit. Je partage ton analyse.
La région, au moins certaines, c’est avant tout une unité culturelle, historique, touristique, que sais-je encore. Alors pourquoi vouloir y toucher; pourquoi vouloir regrouper ce que tout ou presque sépare.
Il suffirait de créer des « unités de gestion », d’administration, plus vastes puisque on pourrait (?) créer des économies d’échelle (?), mais, là, le pb est essentiellement politique comme tu le dis car chacun s’attache à son poste et ne veut pas le perdre. Pourquoi ne nous présente-t-on pas les véritables enjeux au lieu de focaliser le bas peuple sur une perte d’identité culturelle (par ex.)…
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