
Alfred Jarry, notre précurseur à tous parmi les bicyclistes, considérait le vélo comme » un prolongement minéral de son système osseux ».
C’est fou ce qu’on peut faire à vélo.
Depuis l’achat du RonRon pour le chat à l’Aldi en squattant le trottoir pour éviter les ronds-points… jusqu’au tour de la terre du globe-trotter !
Dans cette immense galaxie cycliste, chacun de nous retrouve sa petite république populaire et évite souvent d’aller voir ce qui se passe en dehors de ses limites.
Je pense d’abord à ceux du cyclotourisme dont je suis.
Ceux-là n’imaginent pas le vélo autrement que sous sa forme dominicale, touristique, cyclo-sportive à la rigueur, voire pour les plus endurcis, sous la forme d’un raid de la démesure avec Paris-Brest-Paris qui se joue actuellement.
Paris-Brest-Paris?
Pourquoi pas Paris-Vladivostok?
A ce petit jeu du « qui visera le plus loin? le plus haut? le plus dur? le plus rapide? » on peut ouvrir les paris de superlatifs
Jamais il ne me viendrait à l’idée de pédaler 80 heures et plus d’affilée sur un vélo.
A quoi bon?
On a inventé pour ça les trains, les voitures, les avions,…
Ce dogme du plus, on le sait, est une constante dans l’imaginaire sportif moderne; elle touche tous les domaines de la compétition avec les dérives que l’on connait lorsque les limites des ressources humaines semblent atteintes…
Ainsi faire le Tour d’Autriche sans même s’arrêter, histoire de voir le paysage, de humer l’air des montagnes, de comprendre l’histoire du pays, de rencontrer ses habitants, y compris en parcourant des itinéraires nocturnes me semble le comble de l’hérésie.
Je ne suis pas le seul à le penser.
Cette volonté de se surpasser à vélo ne conduit-elle pas à dénaturer l’essence même du vélo: un outil simple et autonome pour des déplacements locaux et agréables sans polluer ni déranger quiconque.
Je ne parle pas évidemment des coureurs cyclistes, ni des raiders comme ceux du Tour d’Autriche, dont l’environnement motorisé est par définition une annexe incontournable à l’exercice de l’exploit.
Ceux qui restent incrédules à tous ces débordements excessifs à base de vélo sont les cyclos urbains, ceux qui font du vélo l’outil de leur déplacement utile pour simplement se déplacer en ville, faire des courses ou aller au travail.
Ils restent à l’écart de ces fous de vélo qui inaugurent sans cesse des formes renouvelées de stupidité.
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