Les potins du lundi


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Abruti par les toiles d’araignée de l’électronique. Heureusement je me suis soigné.

Ceci un billet en forme d’exercice dédié à ma prof de français de troisième. Un vrai potin de comptoir comme mon prof d’histoire (communiste notoire) les adorait. Souvent il sortait nos copies et les faisait lire aux prolos hilares tout en sirotant sa bière. A la fin, nos copies finissaient souvent au caniveau devant le bistrot et elles revenaient toutes gondolées sur le coin du bureau la semaine suivante.

D’abord l’introduction …

De quoi vais-je parler ce matin?

Je devrais dire écrire.

Mais par un curieux phénomène mental, mon écriture n’est guidée que par une pensée qui affleure le coin de mes lèvres.

C’est certainement un mécanisme qu’expliqueraient les savants de la chose.

Et à partir d’ici admettons le développement d’une pensée hasardeuse dont le sujet émerge petit à petit!…(je ne prends pas de risque)

Je suis donc un causeux qui retire ses mots de la bouche pour les envoyer au clavier de l’ordi, disais-je.

Bref! ma pensée manque de profondeur, je le confesse, elle surfe sur les mots.

Trop sensible aux stimuli qui m’entourent, je fais de rien un tout en un tour de main.

Écrire est devenu pour moi une sorte de bien-être; j’écris donc je suis, si j’ose dire.

Et ma femme qui s’impatiente en bas pour aller chez Casto où y’a tout c’qui faut!

– Un moment, s’il te plait!

Justement, on nous dit que la violence est une forme d’expression de ceux pour qui le geste supplante la parole, une forme d’inculture dans un monde éducatif non abouti où l’offre culturelle dominante peine à convaincre.

Je n’en sais rien, mais je suis prêt à le croire.

Je me souviens encore avoir eu mon bacho technique grâce à l’épreuve de français qui m’a sauvé; un texte à commenter pour potache en perdition …on évacuait ainsi les plus mauvais et ils se rattrapaient comme ils pouvaient ou pas.

C’était pour moi un juste retour des choses à la suite d’une exclusion de la voie générale vécue comme une indignité en troisième.

Bref, chez les mains sales, je me suis fait une raison.

Il y avait alors chez les profs issus de la faculté un vieux fonds de défiance à l’égard de la chose technique, ils soupçonnaient ces enseignements d’être à la solde des patrons.

On était encore dans l’ambiance « lutte des classes » des post-soixante-huitards.

Cinquante après, on paie toujours notre déficit en compétence industrielle face aux Allemands.

J’étais donc dès l’âge de quinze ans promis à un bel avenir en blouse grise devant une machine-outil.

Un sacrifié du latin-grec reconverti dans le pied à coulisse.

C’était l’image qu’on nous vendait pour rejoindre l’école à prolos, un escabeau à trois marches dans l’ascenseur social des « trente glorieuses ».

Il est vrai qu’écrire demande un apprentissage long, trop long pour moi qui mâchait mon capuchon de stylo Bic avant de pouvoir coucher trois mots le dimanche soir devant ma copie blanche.

Quand j’avais fini de hacher menu le capuchon du Bic en plusieurs morceaux, il fallait passer à l’action: écrire!

Sujet, verbe, complément.

Introduction, développement, conclusion.

L’introduction était un calvaire.

Ma prof de français interdisait de commencer la rédac par: « Par un beau dimanche… »

C’était l’interdit fatal qui valait la bulle.

Je ne pouvais tout de même pas dire à l’époque « Par ce dimanche de merde où mon père et ma mère se sont engueulés toute la journée…. », non ça ne se faisait pas.

Il fallait être poli et ne pas dévoiler les secrets de famille comme sur Facebook aujourd’hui.

Alors je comptais les lignes et j’étendais les mots pour que la fin arrive plus vite.

Tracer d’abord une marge généreuse sur la copie était avantageux car on pouvait ensuite remplir une ligne avec trois mots…et le correcteur était à son aise dans la grande marge immaculée pour dire tout le bien qu’il pensait de ma mise en page savante.

Aujourd’hui, à l’heure où l’on ne cesse de débattre de l’école et de ses échecs, je constate qu’écrire est souvent un garde-fou.

Un garde-fou ou si préférez une glissière de sécurité contre laquelle on évite de sombrer dans l’écueil.

Un des écueils de notre société, c’est justement l’illettrisme.

Aujourd’hui encore, je n’ai pas tout compris des arcanes de la grammaire et mes lecteurs n’osent pas toujours le dire.

En revanche, j’aurais du mal à accepter les simplifications des linguistes et des grammairiens.

Me voici donc rendu au terme de ma rédaction car je suis attendu.

Je vais déposer ma copie sur le coin du bureau.

Je commence ici ma conclusion (c’est toujours dédié à ma prof de troisième qui était charmante et dont je devais être amoureux bien qu’elle m’ait bouté chez « les techniques »)

Aimer écrire, c’est comme aimer le vélo.

Il faut s’y atteler.

On peut regretter que très peu se prêtent au jeu des mots alors même qu’ils sont les vecteurs de notre pensée.

La faute à qui ? à quoi?

Ça c’est une autre question qui mériterait plus qu’un modeste billet.

Tout ça pour vous dire que l’écriture est aussi une excellente thérapie contre nos excès, nos excès de bile et nos besoins de révolte.

J’en ai fait l’expérience.

Écrivez!

Et vous irez mieux.

J’ai bon, ma prof ? j’attends vos commentaires…

 

5 réflexions sur « Les potins du lundi »

  1. Eh ben tu es en forme, Maxou ! et pas seulement pour pédaler…
    On sent le vécu dans tes propos, et ce vécu rejoint quelque part le mien 🙂
    Je te souhaite une excellente année et espère une nouvelle rencontre !
    Amitiés
    Charles.

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  2. « je n’ai pas tout compris des arcanes de la grammaire et mes lecteurs n’osent pas toujours le dire »

    Votre grammaire vaut bien celle du premier journaliste venu et même celle des journaux établis. Il y a bien le mot « dénivelé(e) » que je n’avais jamais vu employé au féminin (rare mais correct, apparemment) avant vous mais je mets ça sur le compte d’une coquetterie…

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