Le Tour comme si vous y étiez…


le diable en personne

C’est peut-être forcé et contraint qu’on va devoir suivre nos coureurs à vélo du Tour devant notre télé.

En effet, ce matin, il tombe encore des draches et sous mon Vélux, l’effet de déluge est garanti.

Hier encore, je me suis astreint pour la première fois à passer du temps  à briquer mes vélos, puis je me suis installé devant la lucarne électronique pour voir le spectacle de types qui se bagarrent pour arriver les premiers au casse-croûte.

Avec de belles gamelles tout au long du périple et des rescapés du chemin des Dames s’accrochant pour défiler à Douaumont.

Un vrai jeu de massacre en direct.

C’est comme aux jeux du stade chez les Romains, on veut du carnage en direct avec le replay au ralenti.

Le plus étonnant, c’est qu’aucun d’eux ne prend des photos de ses exploits fracassants ni des paysages visités.

Même pas un selfie devant la butte de Montsec!

Ils n’ont pas le temps. Ils courent les coureurs.

J’avais mis ma casquette de compétition devant la télé pour qu’on me reconnaisse. Celle que Carrefour m’avait lancé généreusement en 2009 depuis son camion qui montait le Firstplan. Au moins j’avais droit à un remerciement pour tout le saucisson que je lui avais acheté dans son magasin mulhousien.

Ma défunte voisine de la vallée du Vair, lorsqu’elle s’installait devant sa télé, était persuadée qu’elle avait rendez-vous avec Léon Zitrone au journal de 13 heures le dimanche. Alors elle ne quittait pas ses habits en revenant de la messe, ni son chapeau. Même si les vaches impatientes meuglaient dans l’étable.

Cette année là, le Tour montait déjà le Firstplan et on avait pataugé dans la boue, le froid et sous la pluie pendant des heures à attendre les compétiteurs.

Montés tôt au col du Firstplan rebaptisé pour la circonstance « Carrefour-Market », nous allions prendre place le long des barrières « Carrefour-Market » et y séjourner plusieurs heures dans le froid et la pluie dense qui s’y installa dès 12 heures.

Nous assisterons donc aux derniers préparatifs, la mise en place du portique de « meilleur grimpeur », le déploiement d’un vaste dispositif de gendarmerie et l’arrivée des spectateurs dont certains installés la veille à bord de confortables camping-cars, d’autres dans des tentes dressées au bord de la forêt et parfois déjà attablés autour d’une bière fraiche dès 9h30 du matin.

Je compris évidemment toute la ferveur, pour ne pas dire la dévotion, qui entoure le Tour de France et le cyclisme professionnel.

Le « diable » légendaire était déjà là au sortir d’une courbe. Babouches aux pieds, fourche à la main, queue entre les pattes, il conversait avec un vacancier dans son costume pourpre et noir, les cornes fièrement ajustées sur son bonnet.

Maxou trempé jusqu’aux os avait sorti son costume de survie en aluminium doré. Un poisson en papillote prêt à être enfourné!

Des cohortes de véhicules anonymes grand tourisme et de motos défilaient devant nous…Les derniers cyclos-spectateurs franchissaient la banderole de « meilleur grimpeur » avant même la course sous l’œil attendri des familles, heureuses d’immortaliser un pareil défi.

C’est alors que la caravane publicitaire s’annonça à grands renforts de klaxons et de sirènes, vitres entrebâillées et lanceurs de gadgets à l’affût…

Pêle-mêle, les véhicules les plus extravagants s’avançaient vers nous… »Vittel », « Cochonou » et sa 2cv rallongée , « Bouygues », « L’équipe » et ses parapluies et même la « CFTC » qui nous informait que « l’ascenseur social était en panne!« …Avec Gaston, on s’est dit « pas de chance! comment vont monter les coureurs si l’ascenseur est en panne?« …Il fallait bien se distraire…

Mais après nous être roulés dans la boue pour attraper les casquettes et les bobs lancés par les amazones de la caravane publicitaire, les voitures du Ministère de l’Intérieur apparurent…allions nous cette fois recevoir des coups de matraques ou des tirs de flash-balls ou des tenues camouflées pour jouer aux gendarmes et aux voleurs?

Rien!

Cette caravane là ne distribuait rien.

C’est ensuite que la pluie se mit à redoubler faisant perdre patience à nombre de spectateurs qui n’en pouvaient plus d’attendre les coureurs cyclistes.

Les coureurs auraient-ils eu, comme la veille, un mouvement spontané de mauvaise humeur en raison du mauvais temps ou des oreillettes parasitées les dirigeant vers un itinéraire plus direct vers Colmar et évitant le Firstplan?…

C’est alors qu’un premier coureur échappé se présenta…

…un allemand, parait-il, dénommé Haussler porteur de la marque de vélo suisse « Cervélo », au grand dam des hollandais tout près de nous, dépités, qui nous avaient pourtant offert le café et pour qui nous avions de la compassion…Gaston tentait d’apprécier la vitesse du compétiteur en fonction de sa propre prestation du matin… »allait-il plus vite que moi, ce matin? »…La question ne fut pas encore résolue, bien que pertinente, que déjà un groupe compact de coureurs approchait…Il semble que le célèbre Armstrong était là, protégé par ses lieutenants…Mais l’hélicoptère lassé d’attendre Armstrong en vol stationnaire au-dessus du Firstplan était déjà parti dans la vallée de Munster rejoindre le fuyard allemand…

Enfin, le gros du peloton s’avança, compact, depuis le fond brumeux de la vallée, silencieux et harassé tandis que les spectateurs tambourinaient comme à une feria sur les barrières « Carrefour-Market ».

Comme je n’étais pas très au courant, je crus reconnaître Jalabert dans ce peloton…alors tous les regards se tournèrent vers moi, même ceux des hollandais, et je compris combien je m’étais trompé d’époque en émettant une telle sottise qui me disqualifiait instantanément de la fête, même en arborant ma tenue de cycliste amateur.

Bref, il fallut attendre un bon quart d’heure la voiture balai qui accompagnait le dernier participant avant d’entamer la descente glaciale du Firstplan dans un monumental défilé hétéroclite d’adorateurs transis, ma casquette à pois rouges, ramassée dans la boue, sur la tête.

Dérision, quand tu me tiens!…

2 réflexions sur « Le Tour comme si vous y étiez… »

  1. Ah, le tour de France ça a quand même du bon, me suis-je dit ce soir, en rentrant du boulot en vélo (je n’avais pas envie d’attendre 1/2h mon tram-train) et en empruntant le tronçon Cernay-Pfastatt par Wittelsheim et Richwiller…qui sera emprunté demain par le tour ! Habituellement, je me bats contre mon envie de m’arrêter tous les 10 ou 20 mètres pour ramasser une cannette vide ou une bouteille plastique qui traine sur le bord de la route… et bien là, non ! Nickel, du jamais vu depuis des années que j’emprunte cette route ! Il y a même des sacs poubelles sur des chassis en bois, le long de la route.
    Pour moi qui ne suis pas « compétition », c’est bien la 1ère fois que je me dis que le tour a du bon… parce que entre nous soit dit, il y a 2 choses sur lesquelles je peux m’asseoir en même temps : c’est un de mes vélo… et le tour de France !
    Mais que le meilleur gagne, en espérant qu’il ne soit pas trop « chargé »… si vous voyez de quoi je veux parler… ça fait tellement longtemps qu’on veut nous faire croire que le tour est propre, en tous cas, sur le bord des routes, ça se vérifie ;-))

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  2. Pour les sacs poubelle, effectivement, il y en a sur tout le parcours dans les cols et parfois tous les 100m. Mais uniquement dans le Haut-Rhin ! parce que une fois franchi le col d’Oderen, plus rien !!
    Initiative (louable) du CG68 ? Riche le CG68 ? Particulièrement porté sur l’environnement le CG68 ? Pragmatique le CG68 car ça évite de repasser derrière la caravane pour ramasser tous les (scandaleux !) immondices venant polluer nos belles routes alsaciennes et nos cols vosgiens ? …

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